2023-01-13

Au cours des nombreuses dernières années, il n’était pas nécessaire d’afficher un bon bilan pour attirer les investisseurs. Si une entreprise requérait du capital, ses dirigeants n’avaient qu’à lever la main et les investisseurs accouraient, tant pour une nouvelle dette que pour de nouvelles actions de la société. Le capital foisonnait et était peu onéreux.

De fait, la société qui jouissait d’une forte santé financière était souvent critiquée. On considérait comme une mauvaise utilisation du capital le fait qu’une entreprise conserve une encaisse importante à son bilan et ne recourt pas à la dette alors qu’elle coûtait si peu cher. Au nom de l’optimisation du capital, la pression a été forte ces dernières années pour que les entreprises s’endettent davantage. J’ajouterais que le même phénomène a touché les particuliers et les investisseurs.

Mais après la hausse subite et prononcée des taux d’intérêt en 2022 alors que les banques centrales ont été confrontées à une recrudescence de l’inflation, la situation s’est complètement renversée : les sociétés en excellente santé financière sont désormais les maîtres de la situation.

Ces sociétés se retrouvent aujourd’hui en position de force. D’une part, ayant peu ou pas de dette, elles ne souffrent pas directement de la hausse des taux d’intérêt. De fait, elles tireront enfin des revenus d’intérêt conséquents de leur encaisse. D’autre part, elles pourront profiter des nombreuses occasions qui se présenteront au cours des mois à venir. Les évaluations de leurs concurrents ont chuté, ce qui rend leur acquisition plus favorable. En outre, alors que leurs concurrents seront accaparés par la nécessité de trouver du capital, les entreprises en bonne santé auront le loisir de choisir les meilleures façons d’investir leur capital, sans trop se soucier de la concurrence.

Voilà une des raisons pourquoi je crois que les titres de sociétés de « valeur » pourraient faire mieux en Bourse par rapport aux titres dits de « croissance » dans les mois, voire les années, à venir. Dans mon esprit, les titres de « valeur » sont ceux de sociétés qui évoluent dans des secteurs plus traditionnels, qui sont rentables (souvent depuis nombre d’années), dont les activités dégagent typiquement des flux de trésorerie positifs et qui bénéficient d’une excellente santé financière. En revanche, les titres de sociétés dites de « croissance » visent généralement la croissance des revenus à tout prix, sans trop se soucier de la rentabilité de ces revenus, ni de leur niveau d’endettement.

Après des années de sous-performance, les titres « valeur » ont surclassé les titres « croissance » en 2022. Ainsi, le fonds indiciel Ishares Valeur du S&P 500 (« IVE ») a enregistré une baisse de 5,4 % en 2022, ce qui se compare très favorablement à la chute de 29,5% de l’indice « croissance » équivalent (« IVW »). C’est tout un revirement : au cours des quatre années précédentes, soit du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2021, l’indice « croissance » avait laissé son ami « valeur » dans la poussière avec un rendement de 129,4 % par rapport à 51,1 %.

Le changement draconien qui s’est opéré dans la dernière année au niveau du coût et de l’accès au capital avantagera les sociétés qui jouissent d’une excellente santé financière. C’est l’une des raisons pour lesquelles je crois que les titres « valeur » pourraient continuer de surperformer pendant un bon bout de temps.