Vous pouvez lire ce rapport ici.
J’espérais en effet que M. Buffett s’exprime sur sa vision des marchés boursiers. J’aurais aimé qu’il nous explique pourquoi il continue d’augmenter l’encaisse de Berkshire Hathaway, qui, à la fin de 2024, se chiffrait à plus de 334 milliards de dollars US. Pour mettre ce chiffre en perspective, une société dont la capitalisation boursière est de 334G$ se classerait environ 25ème parmi toutes les sociétés du S&P 500, tout juste devant Bank of America (333 G$). Pourquoi autant d’encaisse ?
Cependant, je n’ai rien lu dans sa lettre au sujet des marchés boursiers et de leur évaluation.
En revanche, j’ai identifié deux messages clés de la lettre de M. Buffett : l’un concerne l’inflation et la meilleure façon de la combattre, et l’autre concerne l’équité d’une société.
Inflation
Pour M. Buffett, un des principaux risques qui guettent l’investisseur est que la valeur de ses actifs soit décimée par l’inflation. Pour souligner le risque lié aux placements à revenus fixes (encaisse, certificats de dépôt et obligations), il écrit : « L’argent papier peut voir sa valeur s’évaporer si la folie fiscale prévaut. Dans certains pays, cette pratique imprudente est devenue habituelle, et, dans l’histoire courte de notre pays, les États-Unis ont frôlé le bord du gouffre. Les obligations à coupon fixe n’offrent aucune protection contre une monnaie galopante. »
Par « monnaie galopante », M. Buffett considère probablement le risque d’une forte dévaluation d’une devise, qui mène invariablement à une forte inflation.
Même si Berkshire Hathaway a considérablement réduit ses investissements dans les titres boursiers au cours de la dernière année (la valeur de son portefeuille d’actions était de près de 272G$ au 31 décembre 2024, contre 353,8 G$ à la fin de 2023), la société demeure pleinement investie dans les entreprises. En effet, si l’on tient compte à la fois de son portefeuille boursier et de notre estimation de la valeur de ses entreprises détenues entièrement (GEICO, Dairy Queen, Netjets, etc.), l’engagement de la société envers les entreprises se chiffre à près de 1,3 billion de dollars !
Pour Warren Buffett, investir dans des entreprises, que ce soit en Bourse ou par une détention entière, protège mieux contre les ravages de l’inflation :
« Les entreprises, ainsi que les individus dotés de talents recherchés, trouveront généralement un moyen de faire face à l’instabilité monétaire tant que leurs biens ou services sont désirés par les citoyens du pays. Il en va de même pour les compétences personnelles. Ne possédant pas d’atouts tels que l’excellence athlétique, une voix merveilleuse, des compétences médicales ou juridiques ou, d’ailleurs, tout autre talent particulier, j’ai dû compter sur les actions tout au long de ma vie. En effet, j’ai dépendu du succès des entreprises américaines et je continuerai à le faire. »
Équité sociale
Bien qu’il n’ait émis aucun commentaire sur la politique américaine, M. Buffett a tout de même abordé indirectement la situation fiscale du pays ainsi que l’importance de répartir la richesse équitablement parmi la population. En 2024, Berkshire a fait quatre paiements d’impôt au gouvernement fédéral américain totalisant 26,8G$ :
« Alors merci, Oncle Sam. Un jour, vos nièces et neveux chez Berkshire espèrent vous envoyer des paiements [d’impôt] encore plus importants que ceux que nous avons effectués en 2024. Dépensez-les judicieusement. Prenez soin des nombreux gens qui, sans aucune faute de leur part, tirent les mauvaises cartes dans la vie. Ils méritent mieux. Et n’oubliez jamais que nous avons besoin de vous pour maintenir une monnaie stable, et ce résultat nécessite à la fois sagesse et vigilance de votre part. »
À ce sujet, je lisais un article récent dans le Wall Street Journal qui soulignait que les personnes dont les revenus se situent dans le top 10 % des revenus aux États-Unis (revenus annuels supérieurs à 250 000 $ US) accaparaient 49,7 % de toutes les dépenses de consommation du pays. En 1989, ce pourcentage était de près de 36%. Inversement, ces statistiques indiquent que les Américains les moins fortunés et de la classe moyenne s’appauvrissent.
Même si j’aurais aimé en savoir davantage sur l’opinion de M. Buffett sur les marchés boursiers, sa plus récente lettre est une lecture enrichissante pour tout investisseur.
Prenez note que je ferai relâche la semaine prochaine. Bonne semaine de relâche !
Philippe Le Blanc, CFA, MBA
Chef des placements chez COTE 100
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