Toutefois, Dollar General tire environ 82 % de ses revenus de l’alimentation (le reste provient de produits discrétionnaires comme des vêtements ou des articles de décoration) ; à l'inverse, Dollarama génère la majorité de ses revenus grâce à des produits discrétionnaires. Je considère Dollar General comme une chaîne de petites épiceries principalement situées en régions rurales, dont la clientèle est généralement moins nantie.
Fondée en 1939, Dollar General est devenue une entreprise publique en 1968. La société a été privatisée en 2007, avant de faire son retour en Bourse en 2009. Aujourd’hui, elle est l'un des plus grands détaillants aux États-Unis en termes de nombre de magasins, avec plus de 21 000 établissements à travers le pays.
Depuis son introduction en Bourse en 2009, les revenus de la société ont augmenté, passant de 11,8 milliards de dollars à 40,6 milliards de dollars, soit un taux de croissance annuel composé de 8,6 %. Quant à ses bénéfices par action, ils sont passés de 1,04 $ en 2009 à 5,92 $ en 2025 (l’exercice de la société se termine en janvier), représentant un taux de croissance annuel composé de 12,3 %. Cela explique que le titre soit passé d’un cours de 21 $ lors de son introduction en Bourse en 2009 à un cours récent de près de 125 $. En incluant les dividendes, le titre a offert un rendement annuel composé de 12,8 % à ses actionnaires depuis 2009.
Malgré son excellente performance financière depuis 2009, la société a rencontré des difficultés depuis 2020. Comme d’autres détaillants, Dollar General a connu une performance particulièrement robuste pendant les années de la pandémie. Ainsi, en 2021 (son exercice se terminant en janvier), ses revenus ont augmenté de 21,6 % par rapport à 2020, tandis que ses bénéfices par action ont bondi de 57,4 %, atteignant 10,61 $. La société a réussi à maintenir ces bénéfices pendant quelques années, mais dès l’exercice 2024, il est devenu évident que les années dorées étaient derrière elle. De nombreux problèmes sont apparus, notamment des défis logistiques, des difficultés à conserver et à recruter des employés, ainsi qu'une hausse notable des vols à l’étalage. En 2024, les bénéfices par action ont chuté à 7,55 $, puis à 5,92 $ en 2025.
Ce qui est intéressant dans cette histoire, c’est l’évolution du cours du titre durant cette période. Je crois qu’elle démontre bien que les marchés boursiers ont tendance à réagir de manière extrême envers un titre, tant à la hausse lorsque tout va bien qu’à la baisse lorsque la performance d’une société se dégrade.
À la fin de 2022, le cours du titre a atteint un record historique de plus de 255 $. Il est vrai que les bénéfices par action de la société atteignaient alors un niveau record de 10,68 $ (exercice clos en janvier 2023), mais à 255 $, le titre était évalué à près de 22 fois ses bénéfices par action.
Comme mentionné précédemment, les bénéfices par action ont ensuite chuté pour atteindre 5,92 $ en 2025. À son creux du début de 2025, le titre s’échangeait à environ 12,0 fois les bénéfices des 12 derniers mois. On constate l’évolution du ratio cours-bénéfices prévus du titre au cours des 10 dernières années dans le graphique suivant :
Cet exemple illustre bien le fait que les investisseurs ont tendance à exagérer dans leur évaluation d’une entreprise. Lorsque tout va bien, ils ont tendance à croire que les conditions favorables se poursuivront, octroyant ainsi des niveaux d’évaluation élevés. Lorsque la situation semble se détériorer, ils perdent confiance et estiment qu’une amélioration est improbable, accordant alors un faible niveau d’évaluation au titre.
Je pense que cette tendance chez les investisseurs peut être attribuée au biais cognitif de l’extrapolation, soit la tendance à extrapoler les résultats ou une tendance récente.
Cette tendance s’observe constamment sur les marchés. C’est d’ailleurs ce qui crée régulièrement des occasions d’achat attrayantes pour les investisseurs qui regardent au-delà du prochain trimestre. En effet, dans notre gestion de portefeuille, nous avons pu profiter de plusieurs occasions similaires à celle de Dollar General en 2025.
Philippe Le Blanc, CFA, MBA
Chef des placements chez COTE 100
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