J’ai alors publié un blogue intitulé « Dow 20 000 – pourquoi je m’en fous », dans lequel j’écrivais :
« Quelle est la signification d'un Dow Jones à 20 000 ? Aucune, à part le fait que ce soit un niveau psychologique et symbolique pour les investisseurs. En effet, 20 000 n'a pas plus de signification que 1 500 ou 18 865. Mais on ne verra jamais un article dont le titre serait « Le Dow Jones fracasse le niveau des 18 865 » ! »
Neuf ans plus tard*, l’indice Dow Jones s’approche de 47 000. Je prédis un grand party lorsqu’il atteindra 50 000 au cours des prochains mois.
Au Canada, en date du 6 octobre dernier, l’indice S&P/TSX a franchi la barre symbolique des 30 000 points au cours des dernières semaines. Depuis le début de 2025, il affiche une hausse remarquable de plus de 24,5 %. Sur dix ans, il a enregistré un rendement annuel composé de 11,8 %, tandis que sur vingt ans, ce rendement annuel composé se chiffre à 8,3 %.
En 2016, j’écrivais aussi que, « à l’instar des performances sportives, les indices sont ni plus ni moins destinés à fracasser de nouveaux records. Dans l'ensemble, les entreprises qui les composent augmenteront leurs profits avec le temps. C'est inévitable puisque les entreprises réinvestissent une partie importante de leurs profits d'année en année. Qui plus est, à long terme, les hausses générales de prix, l'inflation, assurent une augmentation des profits. »
Retour à la moyenne
Il serait néanmoins dangereux de croire que les indices boursiers ne peuvent que monter, année après année. Il arrive qu’ils connaissent des périodes très difficiles, qui peuvent durer plusieurs années.
L’exemple le plus parlant est sans doute celui de l’indice boursier japonais, le Nikkei 225. Cet indice a récemment connu une belle performance, atteignant environ 45 800 (les Japonais préparent-ils un party pour le jour où il atteindra 50 000 ?). Mais il faut se rappeler que cet indice valait 39 500 points à la fin de 1989, au sommet d’une bulle retentissante qui avait entraîné l’économie et le marché japonais à des hauteurs vertigineuses. Il a fallu 35 ans avant que l’indice retouche son niveau de 1989.
Un exemple qui a davantage touché les Nord-Américains est celui du Nasdaq, l’indice technologique américain par excellence. La bulle techno de la fin des années 1990 avait propulsé l’indice à plus de 5 000 points au début de 2000. Dans les trois ans qui ont suivi, il a perdu 77 % de sa valeur. Il a fallu attendre la fin de 2014, quatorze ans plus tard, avant de revoir le niveau record de 2000.
Dans les deux cas, les indices avaient connu une performance exceptionnelle dans les années précédant leur krach. Pour le Nikkei, il avait enregistré un rendement annuel composé de 19,5 % entre la fin 1979 et la fin 1989. Pour le Nasdaq, ce rendement annuel composé s’élevait à 35,4 % (!) au cours des dix années précédentes.
Le retour à la moyenne décrit la tendance naturelle des phénomènes extrêmes à se rapprocher, au fil du temps, de leur niveau moyen ou normal. Or, on sait que les rendements boursiers à très long terme en Amérique du Nord (sur plus de 100 ans) approchent 10 %. Il faut donc se dire que des rendements largement supérieurs à 10 % pendant plusieurs années sont probablement insoutenables et annonciateurs d’un éventuel retour du balancier.
Au cours des prochains mois, vous lirez probablement des articles vantant les niveaux records d’indices phares : 50 000 pour le Dow Jones ? 25 000 pour le Nasdaq ? 35 000 pour le TSX ? N’y portez pas trop d’attention et considérez plutôt les rendements affichés sur de longues périodes par ces indices. Et surtout, demandez-vous si de tels rendements sont soutenables ou susceptibles de revenir à la moyenne.
Philippe Le Blanc, CFA, MBA
Chef des placements chez COTE 100
* Ce texte a été écrit le 6 octobre 2025.
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