Comme pour les principes abordés récemment, celui de l’autorité nous est très utile dans la plupart des situations que nous rencontrons. Il y a de très bonnes raisons pour lesquelles nous sommes, d'un point de vue évolutif, programmés à suivre les consignes de personnes en position d’autorité, comme un médecin, un policier, une professeure, une dirigeante d’entreprise, etc. Sans cela, imaginez à quel point la vie serait chaotique. Comme l’écrit l’auteur Robert Cialdini : « On nous apprend dès la naissance que l'obéissance à l'autorité légitime est juste et que la désobéissance est mauvaise » et c’est bien mieux ainsi… jusqu’à un certain point.
Il arrive en effet que cette tendance à suivre les directives de personnes en position d’autorité nous cause de sérieux ennuis ou nous pousse à agir de manière que nous regretterons probablement par la suite. Par exemple, je pense que le principe de l’autorité a conduit une partie significative de la population allemande à obéir aux consignes du régime nazi pendant la Deuxième Guerre mondiale. Il est parfois trop facile de justifier ses actes en affirmant que l’on ne fait que suivre des ordres.
Nous sommes également susceptibles de nous laisser influencer par des symboles de prestige, tels que les titres de noblesse, la richesse, les voitures de luxe, les belles montres, etc. Je soupçonne que de nombreux investisseurs se sont laissé entraîner par Bernie Madoff dans la plus grande fraude de type Ponzi de l’histoire parce qu’ils ont été influencés par le prestige de M. Madoff, sa richesse, sa liste de clients célèbres et son style de vie somptueux.
En matière d’investissement, l’avis souvent médiatisé des « experts » peut inciter de nombreux investisseurs à prendre des décisions peu rationnelles, surtout lorsqu’ils se présentent bien (en veston-cravate), sont crédibles et arborent de beaux titres. Je me souviens notamment de la prévision de M. François Trahan, économiste, qui annonçait l’« apocalypse économique en 2024 » et prédisait que les marchés boursiers pourraient perdre 30 % de leur valeur. Le verdict : l’indice S&P 500 s’est apprécié de 25 % en 2024. Ceux qui ont suivi la recommandation de M. Trahan et ont vendu leurs actions le regrettent probablement aujourd’hui.
Comme le dit l’auteur de Persuasion : « L’information provenant d’une autorité reconnue peut nous offrir un raccourci précieux pour décider comment agir dans une situation. » Toutefois, un peu plus loin, il précise : « Une fois que nous comprenons que l’obéissance à l’autorité est généralement bénéfique, il devient facile de nous accorder le confort d’une obéissance automatique. »
Afin de ne pas se laisser influencer, il faut se demander si une personne est réellement experte dans un domaine – quelles sont ses références, ses titres académiques et sa feuille de route ?
Il est également important de se demander à quel point on peut s’attendre à ce que cet expert soit sincère ou véridique. En particulier, quel avantage cet expert tire-t-il à émettre son opinion ? La personne pourrait-elle bénéficier de la baisse ou de la hausse d’un titre recommandé ou des marchés boursiers ?
En fin de compte, l’investisseur doit faire ses propres recherches avant de prendre une décision d’investissement, plutôt que de se fier uniquement à l’opinion d’un soi-disant expert. Comme l’a dit le président américain Ronald Reagan : « Faites confiance, mais vérifiez » (« Trust but verify ») avant de prendre des décisions importantes, en investissement comme dans la vie.
Philippe Le Blanc, CFA, MBA
Chef des placements chez COTE 100
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